C’était une fin d’après-midi froide et silencieuse. Le vieux Marcel rentrait du marché du village, une besace de pommes dans une main, une canne dans l’autre. Il marchait lentement, comme tous les jours, par le petit sentier qui longeait la lisière de la forêt.

Mais ce jour-là, quelque chose clochait.
Trois hommes encapuchonnés surgirent des buissons. Sans un mot, ils encerclèrent Marcel. L’un d’eux le poussa au sol. L’autre chercha sa poche. Le troisième, nerveux, riait.
— « Donne ta montre, papi. Et ton portefeuille, tant qu’on y est. »
Marcel ne cria pas. Il les regarda avec une tristesse muette. Il savait que personne ne viendrait.
Mais il s’était trompé.
Un grondement, profond et sauvage, monta du sous-bois.
Tous se figèrent.
Un loup apparut à la lisière. Grand. Sombre. Le pelage tacheté de cendres et d’ombre. Ses yeux jaunes fixaient les agresseurs avec une intensité presque… humaine.
— « C’est quoi ce délire… ? » murmura un des hommes.
Le loup s’avança. Lentement. Sans précipitation. Mais chaque pas était une menace silencieuse. Les bandits reculèrent d’instinct. L’un trébucha. L’autre sortit un couteau — mais sa main tremblait.
Et puis… le loup grogna. Un seul son. Grave, résonnant. Comme un avertissement.
Les trois hommes prirent la fuite. Sans regarder derrière eux. Disparus entre les arbres comme des enfants pris sur le fait.
Le silence revint. Le vent caressa les feuilles. Le loup s’approcha de Marcel, toujours au sol.
Mais au lieu de l’attaquer, il posa doucement son museau sur l’épaule du vieil homme.
— « Je savais que tu reviendrais, vieux frère… » murmura Marcel avec un sourire.
Personne ne sut expliquer ce qui s’était passé. Mais depuis ce jour, plus personne n’osa s’en prendre au vieil homme.
Et chaque hiver, on voyait au matin des empreintes de pattes autour de sa maison, comme une promesse silencieuse :
Quelqu’un veille.